En avril 2024, nous avons visité le lac de la Maix. Ceci est la transcription de l’exposé qui y a été fait.

Le lac de la Maix est un lac situé à 678 m d’altitude près de Vexaincourt, dans les environs du Donon. Il s’agit d’un lac glaciaire, c’est à dire un lac issu de l’érosion induite par la fonte d’un glacier. Dans notre cas, ce lac a été creusé par la fonte d’un glacier il y a 12 000 ans. Lieu méconnu des Vosges, la beauté naturelle de ce site nous a conduit à y passer une belle après-midi malgré un temps contrasté.

L’histoire du lac de la Maix

Le lac de la Maix tient son nom du « lac de la mer ». L’appellation actuelle « Maix » date du XVIIIe siècle, et pourrait venir de « mar » ou « marais » désignant un plan d’eau sauvage ou bien de « mère » en référence à un sanctuaire ou plan d’eau sacré.

Le lac est situé sur le territoire de l’ancienne principauté de Salm-Salm, disparue lors de la révolution française. La famille de Salm, issue de la noblesse lotharingienne, apparaît dès 899. Le comté de Salm est érigé en principauté en 1623 puis est refondé en principauté de Salm-Salm en 1751, pour être finalement annexé en 1793. Elle s’étendait alors sur 240 km², était peuplée de 10 000 habitants et sa capitale était Senones. Le château de Salm, construit vers 1225 et ruiné en 1475 se situe non loin du lac de la Maix.

Le lac de la Maix a une longue histoire religieuse : cet endroit aurait pu être un lieu de culte et de pèlerinage à l’époque celte. A proximité du lac se trouve le dolmen de la Haute-Côte, sur lequel nous avons très peu d’informations.

Au XIe siècle est fondé l’ermitage de la Mer à coté d’un sanctuaire. Plus tard, une église nommée Notre-Dame-de-la-Mer y sera installée sous la responsabilité de l’abbaye de Senones. Elle sera installée au-dessus d’une chapelle souterraine. Après 650 ans, le pèlerinage est supprimé en 1758 sous prétexte d’abus et d’indécences, et les bâtiments du sanctuaire sont détruits.

La chapelle actuelle a été construite en 1866. Construite en grès rouge et de style roman, elle a été réalisée à la suite d’une souscription organisée par l’inspecteur des forêts de Senones, en pleine époque romantique. Les escaliers d’accès et les murs de soutènement ont été construits avec les pierres de l’ancien édifice.

L’affaire de Vexaincourt

Le samedi 24 septembre 1887, alors que le garde chasse Jean-Baptiste Brignon marchait avec d’autres chasseurs à proximité de la frontière, des détonations retentirent et le groupe fut frappé de balles provenant de l’autre coté de la frontière. Le garde-chasse décéda. Cet incident proche de la frontière exacerba les tensions entre la France et l’Empire allemand.

Cette affaire intervient dans un contexte international tendu, à la suite de l’affaire Schnaeblé, où un policier français a été arrêté par des policiers allemands pour espionnage après avoir été amené sur le territoire alsacien. La France accuse l’Allemagne d’avoir arrêté Schnaeblé sur le territoire français. Cette affaire a eu lieu dans un contexte de tensions revanchardes en France (montée du boulangisme). L’affaire de Vexaincourt est considérée comme encore plus grave que l’affaire Schnaeblé, car il y a eu mort d’homme.

Un lac mystérieux

De nombreuses légendes existent au sujet du lac de la Maix. La plus connue est celle du diable violoneux :

« Un jour de pèlerinage, un musicien inconnu serait venu pour faire danser les villageois au son de son violon. Ceux-ci dansèrent si bien qu’ils n’ont pas entendu la cloche les invitant à l’office. Nul doute que cet étranger était le diable en personne. Le châtiment divin ne se fit pas attendre, la terre s’ouvrit sous les danseurs qui se noyèrent aussitôt dans le lac qui venait d’apparaître. Les villageois furent condamnés à y danser jusqu’au Jugement dernier… De nos jours, on dit que certains soirs on peut encore entendre le violoniste… »

Une autre légende concerne la chapelle du lac de la Maix : ce lieux aurait servi à l’enterrement d’enfants morts-nés.

« Les parents venaient au lac de la Maix avec le corps de leur nourrisson afin de le déposer devant la statue de la Vierge à la chapelle pour implorer son aide. Les anciens certifiaient qu’il était fréquent que les enfants montrent un signe de vie le temps du baptême avant de repartir pour l’autre monde. Mais lorsque le miracle ne se produisait pas, les petits corps sans vie étaient posés
sur une pierre près du lieu saint, où l’on espérait que durant la nuit la Vierge vienne déposer un baiser sur le front de l’enfant. Ce dernier ouvrirait alors les yeux, sourirait à la Vierge, et les anges baptiseraient le tout petit avec l’eau du lac avant d’emporter son âme en paix au Paradis. On pense que de nombreux corps de nourrissons sont enterrés aux alentours du lac, même si l’emplacement exact n’est pas connu. »

Conclusion

Plus que son simple intérêt historique, c’est la beauté du lac de la Maix qui aura amené le Bund à le visiter. Notre visite aura été marqué par un temps très hivernal, ce qui nous a permis de voir l’éclatant reflet des arbres enneigés dans le lac.

Lieu de légendes et lieu de croyances depuis de nombreux siècles, c’est la beauté intemporelle de ce lac qui a depuis toujours attiré les hommes. Notre visite nous rappelle que le beau a depuis toujours inspiré l’homme européen et que l’environnement naturel des Européens à façonné l’histoire de nos peuples. Même aujourd’hui, dans notre monde en perpétuel enlaidissement, la beauté de ces espaces préservés nous sert de repère.

Coureur des bois